c’est une mésange bleue, accrochée à sa cantine…

mésange bleue 1
Le jardin dans son aube hivernale est sombre et silencieux. La cime des arbres dessine des ombres chinoises. La terre retient son haleine sous un manteau glacé. Difficile d’imaginer toute la vie qui grouille au sous-sol ! Aux premières lueurs du jour, un chant perce le ciel, se pose sur une branche. Il vient tous les matins et restera jusqu’au crépuscule. Ce chant jaillit de nulle part. Un chant qui appelle. Peu à peu, il se multiplie. La journée peut commencer. Les mésanges sont là. D’où viennent-elles, où dorment-elles ? Mystère, mystère… de mes anges d’hiver.

mésange huppée 1
Présentes sur terre depuis une vingtaine de millions d’années, c’est dire si les mésanges ont eu largement le temps de se passer de nous et de nous accueillir. Entre temps, elles ont survécu à plusieurs mutations. Elles sont aujourd’hui des espèces protégées. Mais survivront-elles à ce que nous faisons de notre planète, à ce que nous leur proposons pour vivre ? Peut-être. Les capacités de résistance et d’adaptation de ces vieilles dames toutes guillerettes sont étonnantes quand on pense qu’elles ne pèsent que quelques grammes !

mésange noire

Autrefois, elles vivaient surtout dans les haies, les bois et les forêts. Là elles trouvaient de beaux arbres pour avoir de quoi vivre, manger, nicher, se reproduire. En hiver, le bocage fournissait les baies en attendant le retour du printemps et des insectes. En supprimant ces lisières des champs dans le but de cultiver toujours plus pour un meilleur rendement, c’est toute la faune qui a du aller voir ailleurs si la vie était meilleure. Après avoir répandu le pire de ce que nous savons faire, détruire, nous tentons d’offrir aux mésanges et autres oiseaux sédentaires, le meilleur de nous-mêmes, un peu de notre attention.

mésange bleue 2Quelques espèces parmi la grande famille des mésanges, des plus communes au moins fréquentes, suivant les régions et les saisons, apprécient de se réfugier dans nos jardins quand ceux-ci les éloignent aussi de cette menace pesticide qui peut décimer en un rien de temps des colonies entières. Elles sont précieuses pour la vitalité de nos vergers tant elles sont friandes dès le printemps de chenilles pour nourrir leurs nichées, lesquelles chenilles pourraient mettre nos pommiers à terre. Mais pour compléter leur appétit gourmet, elles picorent aussi volontiers les groseilles, cassis et tous les autres petits fruits. Il est pourtant facile de limiter les dégâts pour garantir nos coulis en disposant un filet protecteur. Les solutions chimiques existent aussi pour éviter ces désagréments, et même des produits compatibles avec le jardinage bio, mais avouez que la présence de ces passereaux magnifiques qui animent le jardin, particulièrement en hiver, est une bonne raison de plus pour faire le gros dos, et ce, définitivement, à cette arnaque dévastatrice. Trouver un peu de paix, tout près de chez soi, n’a jamais fait de mal à personne !

mésange charbonnièreLes mésanges mangent toute la journée. Du moins en donnent-elles l’illusion. Hyperactives, très agiles et toujours sur le qui-vive, elles savent aussi parfois attendre leur tour. Elles sont voraces et déterminées, n’hésitent pas d’un coup d’aile à évincer tous ceux qui les empêchent de manger. Cependant, on n’assiste pas à des bagarres spectaculaires, comme c’est le cas bien souvent avec les verdiers ou les chardonnerets élégants. Elles sursautent au moindre bruit et mouvement, s’éparpillent dès que le prédateur tant redouté montre ses moustaches et ses pattes de velours, puis tentent aussitôt un retour vers la mangeoire dès que l’horizon se dégage.

mésange nonetteNourrir et donner à boire aux mésanges et aux autres passereaux en hiver, est l’occasion de leur offrir tous les jours un bon coup de pouce pour qu’ils puissent trouver facilement de quoi reconstituer leur poids qu’ils ont perdu pendant les nuits glaciales. C’est aussi pour nous le moment idéal pour les observer, apprendre à les reconnaître, les différencier, pour remarquer leurs comportements, leurs jeux, leurs acrobaties et leur solidarité. Aussi pour que l’hiver voltige dans nos jardins en dormance, sur nos balcons désertés. Dès que les insectes se réveillent, les mésanges retrouvent rapidement un milieu plus sauvage mais aussi les parcs des villes, tout en ayant la gratitude de venir faire un petit tour d’inspection dans nos jardins afin d’en préserver la vigueur et les prochaines récoltes.

mésange bleue 3Regarder ces ailes qui dansent sur la scène hivernale et nous offrent ce besoin de rester émerveillés à toute saison, en dépit de la hauteur et de la couleur du ciel, écouter leur cri d’appel devenir chant d’amour déjà fin janvier, sentir la joie monter en reconnaissant les signes d’une annonce, celle de la fête du renouveau, et laisser venir ici les mots du poète, ceux de Philippe Jaccottet,

(C’étaient, je m’en avise, des couleurs de mésanges, des couleurs dites froides, portées par des oiseaux d’hiver. Dont le nom rime avec ange, alors que ce sont de vrais petits ogres ailés, voraces et batailleurs.)

© sylvie blanc – l’envol des jours 2013

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* Livre de chevet : Cahier de verdure © Philippe Jaccottet

Editions Gallimard et en format poche : Poésie/Gallimard

 

et pour mieux connaître les mésanges :

Les mésanges – Georges Olioso – Editions Delachaux et Niestlé
Coccinelles, primevères, mésanges… la nature au service du jardin – Editions Terre vivante
Mésange mi-démon (N°196) Revue la Salamandre

Vous trouverez les liens de ces 3 éditeurs  : ici


Commentaire

c’est une mésange bleue, accrochée à sa cantine… — 10 commentaires

  1. Je me réveille, je viens aux nouvelles et j’entends le chant des mésanges…
    Toute mon enfance à mettre des miettes du petit déjeuner sur le balcon, à leur proposer une cabane dans le jardin avec un peu de beurre avant de partir à l’école dans le froid de l’hiver… Ses couleurs, cette ode à la nature et la nécessité de lui redonner sa place, sa vie et sa simple beauté…
    J’adore, tu m’émerveilles de ses instants, à observer celle qui pourrait nous faire perdre le fil du temps, picorer et voler…

    • Merci Christine pour ta visite néo-zélandaise, à ce propos, comment sont les mésanges sous le long nuage blanc ? et tu vois quand je disais que les mésanges avaient vécu plusieurs mutations, il y a aussi celle de ne plus leur donner des miettes de pain (c’est même fortement déconseillé), pourtant nous avons tous fait cela et elles n’avaient pas l’air de s’en plaindre… sacrément robustes les pitchounettes !

      • J’ai vu des moineaux… Pleins… Pas fait attention aux mésanges, je regarde si je trouve des pitchounettes robustes à qui je vais donc éviter de donner des miettes… ;-))

  2. merci Sylvie pour cette petite merveille au creux de l’hiver. ça m’a rappelé la chanson d’anne sylvestre « vous vous trompez mon bon monsieur moi je suis la mésange bleue… » que j’écoutais avec mes filles quand elles étaient petites. et le bonheur chaque matin de les voir se précipiter sur mon balcon pour trouver pitance. hélas maintenant c’est interdit de les attirer à cause des pigeons…

    • Quel bonheur de retrouver cette chanson d’Anne Sylvestre grâce à vous ! Tout comme ce tendre souvenir avec vos filles. Merci Anne pour votre visite…

  3. Merci Sylvie de ces belles photos.Pour moi, elles sont les petites fleurs du ciel que les anges nous envoient, pour nous enchanter, par leurs couleurs et quel spectacle, lorsqu’au restaurant, elles sont attablées.

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